Le monothéisme conduirait-il ontologiquement à la violence ? Serait-ce le zèle pour Dieu qui porterait potentialité de tuer en son nom ? Le judaïsme se confronta très tôt à cette question d’une formidable complexité : peut-on, et à quelles occasions, contrevenir au sixième commandement et porter atteinte à son prochain ? Moïse et Pinhas, Jérémie et les Maccabées, les zélotes, Yohannan ben Zakkaï e Jésus ont respectivement à estimer la situation de leur temps et à délimiter des espaces de violence contenue, interdite ou au contraire impérative. L’enjeu est considérable, puisque la légitimité d’une telle violence est originée à la source de la justice divine, et du nécessaire combat pour sa défense ; à travers toute l'histoire du judaïsme ancien, c’est l’une des controverses majeure et existentielle, clivant différentes interprétations internes des textes sacrés, qui, toutes, se positionnent vis-à-vis d’un contexte externe : religieux, politique ou géopolitique. Une logique générale se dégage-t-elle de cette fresque millénaire ? La violence comme son refus sont tous deux des choix, et les hommes souhaitent chaque fois créer les conditions de l’avènement du royaume de Dieu et de la paix universelle. Ultimement, c’est le libre arbitre du croyant qui est ainsi sollicité.
Stéphane Encel est docteur en histoire des religions (Paris IV), spécialiste du judaïsme ancien. Il poursuit ses recherches sur la période du second Temple. Il est professeur de culture générale et d’interculturalités religieuses à l’ESG Management School.