Auteur : BEREZINE Ilya Nikolavitch
Ce Voyage en Perse du Nord fait suite au Voyage au Daghestan et en Transcaucasie et constitue le second tome des Voyages en Orient de I.N. Bérézine. Il fait partie de la double mission d’études de trois ans (1842-1845) confiée à Bérézine et à son collègue W. F. Dittel par l’Université des Langues orientales de Kazan dont ils venaient d’être diplômés. Bérézine ne voyagea pas avec Dittel (mort en 1848).
Cette seconde relation foisonne de notations sur la vie culturelle, tant rurale qu'urbaine, et sur de nombreux personnages, des plus officiels aux plus modestes. Les observations concernent notamment les anciennes capitales sous les Safavides : Tabriz et son importante activité économique et culturelle ; Qazvin. Mais les cinq chapitres sur Téhéran constituent la partie la plus importante de ce voyage. Bérézine nous fournit le premier plan de la ville, la première information sur l'introduction en Perse de la photographie (daguerréotypie). Son analyse porte notamment sur le souverain régnant, Mohammad Shâh, son vizir Hâdji Mirzâ Âqâsi (pro-russe), sa cour, l'administration, l'armée, etc.
Bérézine attribue à l'Islam, et particulièrement au shiisme, un rôle négatif dans l'éducation et le développement du pays. Cependant, vivement intéressé par la culture populaire, il décrit longuement les deuils religieux shiites et les ta'ziyehs, commémorations théâtralisées du drame de Karbalâ, et les rituels y afférant.
Jean Calmard, directeur de recherche honoraire au C.N.R.S, chargé de conférences à l'École Pratique des Hautes Études, Section sciences historiques et philologiques (1975-2001).
Auteur : BEREZINE Ilya Nikolaevitch
Ce Voyage au Daghestan et en Transcaucasie constitue le premier tome du “Voyage en Orient” de I.N. Bérézine, qu’il a rédigé à son retour à Kazan en 1845, d’après les notes collectées dans son journal de voyage. Il était parti, à 23 ans, en juillet 1842, sur une mission de fin d’études de l’Université des Langues orientales, alors située à Kazan avant d’être transférée à Saint-Pétersbourg. Le programme strict de ce voyage d’étude prévoyait les étapes, les séjours et les observations, très nombreuses, que devait faire l’auteur au long d’un périple de trois ans. Il devait traverser le Caucase et la Perse puis se rendre en Iraq, en Palestine, en Égypte puis en Turquie. Ses observations devaient porter sur la linguistique, la géographie, l’histoire, l’économie, l’ethnographie des régions traversées. L’ouvrage ici présenté concerne les premiers mois de ce voyage, d’Astrakhan à la frontière persane. Bérézine nous donne un récit très original pour l’époque, tableau très vivant, et très savant aussi, des régions traversées.
En dépit de ses réflexions scientifiques qui démontrent sa très vaste culture, son style reste vif, enjoué souvent même, et ses références discrètes aux littérateurs politiques exilés au Caucase affirment ses goûts littéraires. Il traverse des régions alors ravagées par la guerre de conquête que mènent les Russes contre les “Montagnards” conduits par le “prophète-guerrier” Chamil. Par chance, il passe en 1842, à un moment où règne un calme précaire. Missionné officiel de l’État russe, il ne peut que prendre parti pour les armées tsaristes dont il tente de justifier l’action par l’idéal européen de pacification et d’éducation des populations. Ce voyage, dans des régions alors rarement visitées du fait de la guerre, est une mine de données précises et très variées collectées par un esprit d’une rare curiosité. La multiplicité des facettes présentées par cet ouvrage, et le nombre impressionnant de références, dont des citations en arabe ou en persan, ont sans doute été la raison pour laquelle aucune traduction complète n’en a jamais été faite.
Cette traduction, qui tente de respecter le style et l’orthographe de l’époque, a été l’œuvre d’une très longue haleine. Le second tome de ce voyage traite de la Perse du Nord et s’arrête sur une longue description de Téhéran, de l’administration persane et de la cour du Chah. Pris, dès son retour, par ses responsabilités universitaires à Kazan puis Saint-Pétersbourg, Bérézine ne pourra plus poursuivre la publication de son voyage sous forme d’ouvrage. Il le fera dans de très nombreux articles parus dans des revues russes.
Jacqueline Calmard-Compas est ingénieur au C.N.R.S., spécialisée dans la publication d’ouvrages portant sur l’histoire de l’Iran et du Caucase. Elle est titulaire de diplômes de persan et de russe.
Auteur : TOUZARD Anne-Marie
La présente monographie retrace la carrière mouvementée du drogman (interprète) Etienne Padery, initialement missionné, en 1714, par l’ambassadeur de France à Constantinople pour accompagner un envoyé persan à la cour de Louis XIV.
Après moult péripéties, cet ambassadeur, Mohammad Rezâ Beg, fut reçu en grand apparat à Versailles (19 février 1715). Un nouveau traité franco-persan, modifiant celui de 1708, avec des “provisions” plus favorables au commerce français fut signé le 13 août 1715. Louis XIV mourut peu après, le 1er septembre. C’est donc au début de la Régence que Padery fut chargé d’escorter l’encombrant Mohammad Rezâ Beg pour son retour en Perse, via la Russie. Mais après un voyage pénible, il quitta l’ambassadeur à Copenhague et rentra à Paris où il œuvra pour obtenir une mission en Perse. Une mission officielle, chargée d’obtenir la ratification du nouveau traité par la cour de Perse fut confiée à Ange de Gardane, qui s’embarqua à Marseille avec son frère François (mars 1716). De son côté, Padery s’efforçait de discréditer Gardane, qu’il jugeait incompétent, et briguait une mission en Perse afin de reprendre le projet d’alliance franco-persane pour la conquête de Mascate, ce qui aurait dû assurer la prépondérance du commerce français en Perse. Soutenu par le financier John Law - fondateur de la Compagnie perpétuelle des Indes (1719-1769) - et par le cardinal Dubois, Padery obtint du Régent une mission “secrète”.
La France était dès lors représentée en Perse par deux envoyés rivaux : Ange de Gardane, consul de France à Ispahan, et Padery, consul à Chiraz, placé sous ses ordres. C’est finalement Padery qui obtint, en 1722, la ratification du traité au moment où les Afghans envahissaient la Perse et mettaient un terme à la dynastie des Safavides, ce qui rendit immédiatement caduc ce nouveau traité. Les incessantes querelles des deux hommes donnèrent lieu à une abondante correspondance avec leurs supérieurs, ainsi qu’à la rédaction du “Compte au Roy” que Padery adressa à la cour de France dès son retour. Ces documents, conservés dans les archives diplomatiques françaises, donnent une image très vivante du caractère particulièrement complexe et ambigu de la diplomatie française de l’époque.
Basé sur une abondante utilisation des sources diplomatiques françaises, cet ouvrage constitue une version révisée de la thèse de Madame Anne-Marie Touzard, sur “Les relations franco-ottomano-persanes (1704-1725) à la lumière de la mission de Padery”, préparée sous la direction de M. Jean Calmard, et soutenue à l’Ecole Pratique des Hautes Etudes, Sciences historiques et philologiques, Paris, Sorbonne, 1993.
Auteur : ARDALAN Sheerin
Depuis plus d’un siècle, les études sur les Kurdes et le Kurdistan sont l’objet de recherches et de controverses portant surtout sur leur apparition dans l'Histoire, leurs origines ethno-linguistiques, les diversités de leur culture intellectuelle et matérielle (langues, littératures, économie, religion etc). Mais c’est surtout la montée du nationalisme kurde et le “problème” des Kurdes et du Kurdistan qui, depuis des décennies, occupe le devant de la scène. L’étude de l'histoire des Kurdes et de leurs principautés, jusqu’au XIXe siècle, objet de travaux de pionniers tels que Vladimir Minorsky et Basile Nikitine, a donc été trop souvent reléguée au second plan par les chercheurs qui y trouveraient, pourtant, l’origine et l’explication de nombre de questions actuelles. C’est avec beaucoup de courage que Madame Sheerin Ardalan a entrepris et poursuivi ses recherches sur l'histoire des Kurdes, et plus particulièrement sur la famille dynastique des Ardalân, dans un contexte personnel très difficile.
Le travail ici présenté constitue l'aboutissement de ces recherches mises en forme pour une thèse qui, malheureusement, n’a pu être soutenue. A travers les vicissitudes des conflits entre la Perse et l’Empire ottoman, la principauté des Ardalân, bien qu’amputée de sa partie en territoire ottoman, parvint à se maintenir jusqu’en 1867. La profonde connaissance de la culture kurde de Madame Ardalan transparaît dans cet ouvrage particulièrement novateur, surtout à propos de la carrière de Khosrow II le Grand, un oublié de l’Histoire, éclipsé par son célèbre cousin Karim Khân Zand et par la montée en puissance des Qâjâr qui mettront un terme à la dynastie des princes Ardalân. L’analyse historique est parcourue de références aux aspirations sprituelles de ces princes, parfois considérés comme de saints personnages. Cette force spirituelle les soutint dans leur résistance aux appétits de puissance des Ottomans et des souverains de la Perse et leur permit de sauvegarder l’essentiel de leurs valeurs culturelles jusqu’à la fin du XIXème siècle.
Descendante en ligne directe des derniers vâli régnants, Sheerin Ardalan (1955-2002) a très tôt entrepris de recenser et rassembler documents, récits et témoignages ayant trait à l’histoire de sa famille. Le présent ouvrage résulte d’un travail de synthèse commencé en 1995 et qui a trouvé son aboutissement dans le cadre de l’Ecole Pratique des Hautes études (Paris), sous l’autorité du professeur Jean Calmard. Sheerin Ardalan était ingénieur en physique nucléaire, diplômée de l’Ecole Polytechnique de Lausanne, et détenteur d’une Maîtrise (M.S.) en Recherche Opérationnelle de l’Université de Columbia (New York).