Peu de Français connaissent aujourd’hui ce nom qui, à l’époque, a pourtant été régulièrement cité dans la presse européenne. Originaire d’une riche famille musulmane de Minya, Hoda Charaoui est sans doute « la pionnière du mouvement de libération de la femme dans tout le monde musulman » (Nawal El Saadawi). Elle fonda le mouvement féministe égyptien. Cette Égyptienne polyglotte, née en 1879 et décédée en 1947, mariée à treize ans, joua un rôle très actif pour l'émancipation de la femme arabe musulmane. Elle créa, dès 1919, la Société de la femme nouvelle, puis quelques années plus tard, l’Union féministe égyptienne. Témoin oculaire d’évènements politiques cruciaux et engagée politiquement, notamment au sein du parti nationaliste, Al-Wafd « La Délégation » aux côtés de son mari, elle milita contre le colonialisme des grandes puissances, le patriarcat autochtone mais aussi contre la corruption. Elle lutta pour l’égalité homme-femme. Elle ouvrit des salons littéraires et des clubs culturels dédiés aux femmes. En 1925, elle créa le mensuel francophone L’Égyptienne, revue de sociologie et de culture pour la défense du féminisme, du panarabisme et de la Palestine. Son parcours exemplaire s’illustra par une action qui fit date : c’est la première qui, en public, arracha son niqab turc au cours d’une festivité publique. Aux dires de Alaa al-Aswany « la libération de la nation égyptienne était inséparable de la libération de la femme ».
Vingt-sept revues féministes ont vu le jour entre 1892 et 1957. Hoda Charaoui, comme Hind Naufal, May Ziadé, Dorriya Chafiq ou encore Out El Kouloub, esquissèrent, par leurs écrits et leurs actions, les contours d’une prise de conscience d’une identité féminine également illustrée par Mary Kahîl, Céza Nabarawi ou encore Badawiya Moussa.